RevUE de la conférence du CJMM et du CÉRIUM proposé par Simon Raimbault

« Entre Union européenne et Russie : tensions électorales aux marges de l’Europe », le 20 novembre 2024 avec Magdalena Dembinska (UdeM), Frédéric Mérand (UdeM).

Le 20 novembre 2024, le Centre Jean Monnet a accueilli une conférence animée par la Pr. Magdalena Dembinska et le Pr. Frédéric Mérand, tous les deux au Département de sciences politiques de l’Université de Montréal. Intitulée « Entre Union européenne et Russie : tensions électorales en marge de l’Europe », cette conférence a abordé les dynamiques électorales en Géorgie et en Moldavie, deux États aux portes de l’Union européenne, confrontés à des défis cruciaux liés à la guerre en Ukraine, et aux tensions entre les sphères d’influence européenne et russe.

Nos deux intervenants ont d’abord présenté le contexte politique et géopolitique de ces deux pays. En Moldavie, la réélection récente de la présidente pro-européenne Maia Sandu et le référendum visant à inscrire l’adhésion à l’Union européenne dans la constitution ont souligné les aspirations européistes d’une partie de la population. A aussi été aussi rappelé que la Moldavie reste profondément divisée, avec une opposition marquée entre les partisans d’une intégration européenne et ceux favorables à un rapprochement avec l’Union économique eurasiatique. L’élection présidentielle a par ailleurs illustré les fractures géographiques et sociales internes au pays. Le camp « oui » au référendum n’ayant pu être que très finement majoritaire grâce au vote massif de la diaspora moldave vivant à l’étranger.

Côté Géorgien, malgré un soutien populaire largement pro-européen, la situation est plus ambivalente. Le gouvernement en place, sous la bannière du parti « Rêve géorgien », affiche une proximité croissante avec la Russie, notamment à travers des mesures controversées comme l’adoption de lois inspirées des politiques russes et une augmentation importante des échanges économiques et touristiques avec Moscou. Les élections parlementaires d’octobre 2024, donnant vainqueur le « Rêve géorgien », ont en effet été marquées par des irrégularités et des manifestations populaires, témoignant de la tension qui règne dans ce pays où le souvenir de la guerre de 2008 reste encore bien présent.

Les échanges ont également exploré le rôle de l’Union européenne dans ce contexte. Si l’octroi du statut de candidat à l’adhésion pour ces deux pays a été perçu comme un signal fort de soutien, nos conférenciers ont souligné les défis nombreux du processus d’intégration. Les divisions internes de l’UE, notamment la position de Viktor Orbán en Hongrie, le décalage entre les attentes des pays candidats et les critères d’adhésion de Copenhague, créent une dynamique fragile. La perspective d’un bis repetita du cas turc, où des promesses d’intégration restent sans suite, pourrait engendrer frustration et instabilité importante dans la région.

Enfin, nos intervenants ont mis en lumière l’impact de la guerre en Ukraine sur les processus électoraux et politiques. Les questions sécuritaires, économiques et sociales, exacerbées par la présence de troupes russes sur le sol moldave et géorgien, renforcent les dilemmes stratégiques de ces pays entre volontés d’émancipation et nécessaire stabilité. La Moldavie, par exemple, fait face à une inflation des prix de l’énergie majeure après avoir rompu ses liens d’approvisionnement avec la Russie, tandis que la Géorgie, bien que plus stable économiquement, reste sur le fil du rasoir diplomatique.

Cette conférence a permis de mieux comprendre les interactions complexes entre les ambitions européennes, les dynamiques nationales géorgiennes, moldaves et l’influence russe. Elle a également soulevé des questions cruciales sur l’avenir de l’élargissement européen et la capacité de l’UE à répondre aux attentes de ses voisins orientaux tout en gérant ses propres divisions internes.

Simon Raimbault.



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