RevUE de la conférence de Brice Arsène Mankou proposé par Jérémy Lardry-Cochet
« L’Europe et la surveillance des frontières », le 3 avril 2024, avec Brise Arsène Mankou (Université de Rouen Normandie).
Dans l’enceinte de l’Université de Montréal, Brice Arsène Mankou, professeur reconnu pour ses recherches sur l’interaction entre médias et migration, a tenu une conférence intitulée « L’Europe et la surveillance des frontières ». Cette intervention s’est inscrite dans un partenariat avec le centre de recherche en éthique, mettant en lumière les tensions entre nécessité sécuritaire et respect des droits de l’homme dans la gestion des frontières européennes.
Arsène Mankou a débuté par une exploration de la notion même de frontière, envisagée tant sous ses aspects physiques que symboliques, pour ensuite questionner les méthodes de surveillance employées par l’Europe. Au cœur du débat : la compatibilité de ces pratiques avec les standards internationaux des droits humains. La création de Frontex, l’agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes, a été discutée comme réponse européenne à la crise migratoire, soulignant sa mission de contrôle et de rapport sur la traversée des migrants, principalement d’Afrique vers l’Italie.
À travers l’exemple de la frontière de Calais, décrite comme une “prison à ciel ouvert”, le conférencier a illustré le désespoir des migrants cherchant à rejoindre le Royaume-Uni, perçu comme un eldorado. Cette situation, comparée à celle des frontières contestées entre Israël et la Palestine, révèle l’ampleur des défis humanitaires et sécuritaires.
La conférence a également mis en exergue les outils technologiques de surveillance comme les systèmes d’information sur les visas et la vérification systématique aux frontières, facilitant le suivi des migrants, mais soulevant des questions éthiques quant à la surveillance et à la stigmatisation des personnes en mouvement.
La problématique centrale soulevée par Arsène Mankou interroge la finalité de ces technologies : sont-elles au service de l’humain ou constituent-elles des moyens de traque ? Le droit international, rappelle-t-il, garantit des droits fondamentaux à tous, y compris aux migrants, mettant ainsi en lumière la dichotomie entre la protection des frontières et le respect des libertés individuelles.
Le cas de Frontex est symptomatique des dilemmes rencontrés : malgré son rôle crucial, l’agence est souvent critiquée pour son incapacité à concilier efficacement gestion des frontières et respect des droits de l’homme. Cette situation est d’autant plus poignante que, dans des circonstances comme celles de la crise ukrainienne, l’Europe a montré sa capacité à ouvrir ses frontières de manière plus humaine et inclusive.
En conclusion, Brice Arsène Mankou appelle à un rééquilibrage entre les impératifs de sécurité et les principes éthiques fondamentaux. Il souligne que si surveiller les frontières relève de la souveraineté étatique, cette surveillance doit impérativement s’inscrire dans le respect des droits humains. La conférence se termine sur une note d’espoir, évoquant la potentialité positive de l’immigration, illustrée par l’accueil de médecins étrangers dans certains territoires, montrant ainsi que l’ouverture peut être synonyme d’enrichissement mutuel.
Au-delà des politiques et des dispositifs techniques, cette conférence nous rappelle l’importance d’une réflexion profonde sur notre manière d’envisager l’autre, dans un monde où la mobilité humaine est une réalité incontournable, interpelant notre humanité collective.
Jérémy Lardry-Cochet.